Le 28 mars prochain, à Bruxelles, se déroulera la 10ème édition du Forum pour le futur de l’agriculture (FFA). Ses organisateurs, Syngenta (multinationale chimique et agroalimentaire) et ELO (lobby des grands propriétaires fonciers européens), y présenteront l’agriculture qui, selon eux, devra répondre aux défis alimentaires et environnementaux.
Une coalition d’organisations paysannes (membres du mouvement La Via Campesina), d’organisations de la société civile et de citoyen-ne-s dénoncent ces fausses solutions de l’agrobusiness et invitent à se mobiliser pour lancer un message fort aux organisateur-ice-s et participant-e-s de ce forum : cette agriculture n’a pas de futur !
Signer l’appel : http://www.fian.be/Mobilisons-nous-contre-le-FFA-pour-le-futur-de-l-agriculture?lang=fr
De fausses solutions aux mauvais problèmes
Sous un titre charmeur « là où l’agriculture et l’environnement se
rencontrent », le forum présente un panel d’intervenants prestigieux
(UE, OCDE, ONU, etc.) incluant aussi des ONG de conservation de la
nature et des intellectuel-le-s. Derrière cette façade aux apparences de
débat ouvert se cache pourtant une coûteuse entreprise d’influence des
pouvoirs politiques. Au moment où la réforme de la Politique agricole
commune (PAC) de l’Union européenne et où de réglementations relatives à
certains pesticides sont en cours de discussion, il est crucial pour
les acteurs de l’agrobusiness de défendre leurs intérêts. Pour cela, ils
se présentent comme les champions de la lutte contre la faim dans le
monde et pour la préservation de l’environnement, ne défendant pourtant
que des fausses solutions. Pour répondre aux défis alimentaires actuels
et à venir, leur discours est invariable : augmenter la productivité des
surfaces agricoles grâce à la technologie et diminuer davantage les
entraves au libre-marché.
En posant la question : “Comment nourrir 9 milliards d’êtres humains
en 2050 ?”, les organisateurs du FFA entretiennent le mythe qu’on ne
produit pas assez aujourd’hui pour alimenter l’humanité. Or selon la FAO
nous produisons déjà assez de nourriture pour 12 milliards de
personnes ! Les causes de la faim et de la malnutrition sont plutôt à
rechercher du côté de l’extrême pauvreté (notamment en milieu rural, qui
comprend environ 70% des personnes souffrant de la faim), du gaspillage
alimentaire (30% des quantités produites à l’échelle mondiale sont
gaspillées selon la FAO) et de l’accaparement de surfaces agricoles au
bénéfice des agrocarburants et du bétail (pour la production de fourrage
et pour l’élevage).
Les lobbies et les multinationales vendent une agriculture soi-disant
intelligente (smart agriculture en anglais) : robotisée, chimique,
biotechnologique et spécialisée. Elle n’a pourtant pas pour effet de
nourrir celles et ceux qui meurent de faim, mais de rendre les
producteur-ice-s encore plus dépendant-e-s aux multinationales
agroalimentaires. Outre leurs impacts sur la santé et l’environnement,
ces technologies accélèrent l’endettement et la disparition des
paysan-ne-s.
Aussi, considérer les aliments comme une simple marchandise devant
être soumise au libre-marché est une des principales causes de
l’appauvrissement du monde paysan et de notre biodiversité. Tant au Nord
qu’au Sud, la mise en concurrence des agriculteur-ice-s favorise les
grosses exploitations au détriment des paysan-ne-s, qui subissent de
plein fouet les conséquences désastreuses de ce modèle : baisse des
revenus, perte d’emploi, disparition des fermes, endettement massif,
spéculation sur les terres agricoles et sur les denrées alimentaires,
etc. Depuis 30 ans, la Belgique a perdu 63% de ses fermes, soit 43
chaque semaine. Ce sont surtout les petites exploitations qui sont
touchées.
Des marchands de mort peints en vert
L’agriculture des machines, de la chimie et des transports
internationaux ne peut se passer des énergies fossiles. Pourtant,
Syngenta se présente comme un champion de l’environnement. Lors de
l’édition 2016 du FFA, des abeilles en peluche étaient distribuées pour
vanter des initiatives aux résultats obscurs. L’entreprise organisatrice
voulait probablement faire oublier qu’elle déploie d’intenses efforts
contre l’interdiction des néonicotinoïdes, pourtant pointés du doigt par
la communauté scientifique pour ses conséquences désastreuses sur les
pollinisateurs naturels comme les abeilles et les bourdons.
Sur son site web, cette entreprise déclare que s’opposer à l’utilisation
d’OGM, d’engrais chimiques et de pesticides revient à utiliser plus
d’eau et de terre, prouvant sa mauvaise foi en feignant d’ignorer les
solutions qui font déjà leurs preuves.
Des solutions existent : agroécologie et souveraineté alimentaire
L’agriculture que l’agrobusiness nous propose n’a rien de nouveau.
Elle ne fait que poursuivre la logique qui a amené la destruction de nos
sols, la détérioration de la biodiversité, la pollution de nos eaux et
la disparition de nos fermes. La vraie agriculture intelligente,
l’agriculture du futur, est celle qui s’inspire des écosystèmes
naturels. Une publication du rapporteur spécial sur le droit à
l’alimentation de l’ONU précise que l’agroécologie pourrait doubler les
productions en 10 ans, atténuer le changement climatique, protéger l’eau
et créer de nouveaux emplois dans le secteur rural.
Plutôt que de soumettre les denrées agricoles au libre marché et aux
diktats de l’agrobusiness, ce sont les peuples qui doivent définir leurs
systèmes agricoles et alimentaires, pour disposer d’une alimentation
saine, adaptée à leurs besoins, et produite localement et de manière
durable. Voilà pourquoi nous estimons qu’il est indispensable de miser
sur la souveraineté alimentaire.
Pas plus que nous ne voulons que des marchands d’armes se chargent de la
paix, nous ne voulons que des marchands de poison se chargent de notre
alimentation. Leur intérêt n’est que financier. Leur agriculture
entraîne la mort des paysan-ne-s, des mangeurs et de l’environnement.
Elle représente le passé.
Nous voulons porter un message clair aux décideurs politiques européens
et internationaux, qui doivent mettre fin à l’influence des intérêts
privés de l’agrobusiness et doivent prendre leurs responsabilités pour
opérer la transition agroécologique.
Nous appelons un maximum d’organisations et de mouvements à signer cet appel et à nous rejoindre le 28 mars
Pour notre futur, mobilisons-nous !
Infos pratiques
Un rassemblement est organisé le 28 mars 2017, de 12h30 à 13h30, au Mont des Arts, face au square.
Au programme : prises de parole, buffet paysan, action symbolique.
Premiers signataires :
FUGEA
MAP
FIAN Belgium
CNCD-11.11.11
Rencontre des Continents
Début des Haricots
Quinoa
Réseau des GASAP
Association 21
Les amis de la terre
CEO
CADTM
Les Brigades d’Action Paysanne
SCI - Projets Internationaux