L’entraide, l’autre loi de la jungle Réflexion et résumé

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de "donner-recevoir-rendre" génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Le livre "L’entraide, l’autre loi de la jungle" par Pablo Servigne et Gauthier Chapelle.

Article de réflexion et résumé du livre par Daniel Cauchy, membre fondateur de Rencontre des Continents

 

« La monstrueuse pathologie atomiste que l’on rencontre aux niveaux individuel, familial, national et international - la pathologie du mode de pensée erroné dans lequel nous vivons tous - ne pourra être corrigée, en fin de compte, que par l’extraordinaire découverte des relations qui font la beauté de la nature. »

Gregory Bateson

 

Si comme l’écrit François Flahault, « … la tâche de rappeler ce qui devrait être est aisée alors que celle de penser autrement ce qui est se révèle plus difficile que jamais. », nos deux auteurs affrontent une question difficile et proposent une cure de décolonisation de nos imaginaires modernes. Ils nous offrent une belle synthèse des connaissances scientifiques actuelles montrant que les « relations qui font la beauté de la nature » ne se limitent pas à la compétition et au combat de chacun contre chacun. Avec un livre comme « L’entraide, l’autre loi de la jungle », on sort complètement des discours moralisateurs ou normalisateurs nous décrivant comment le monde et les humains devraient être ! Il s’agit ici de voir la vie autrement !

C’est un livre « médicament », il nous soigne de cette pensée bien installée dans nos têtes, nos pratiques, nos institutions, nos conceptions politiques : celle d’un homme « naturellement » mauvais, soumis à la loi de la jungle, à la « loi du plus fort », celle du combat de chacun contre chacun. Pensée qui nous propose la compétition comme seul facteur d’évolution. Comme le disent nos auteurs : « Cette mythologie a fait émerger une société devenue toxique pour notre génération et pour notre planète. »

Ce livre bouscule les frontières entre les disciplines scientifiques pour « comprendre la nature coopérative de l’être humain dans le sillage de celle des autres organismes vivants ». Et pour cela de mobiliser des connaissances issues de bien des disciplines différentes : de la biologie à l’ethnologie, des neurosciences à la génétique, de la sociologie à l’économie expérimentale. Il a pour but de « dégager des principes généraux et une architecture générale de ce que l’on pourrait désormais appeler « l’autre loi de la jungle » : celle de l’entraide.

 

- Paradigme dominant : la compétition

La « loi du plus fort » ou celle de la « guerre de tous contre tous », comme l’écrivait Thomas Hobbes, nous invite à voir la vie, le monde, comme une arène au sein de laquelle dominent la ruse et la force. Que le plus fort gagne ! Et notre culture « moderne et utilitariste, est effectivement devenue hypertrophiée en compétition, délaissant sa partie généreuse, altruiste et bienveillante, passablement atrophiée. »

Nous le savons : « l’homme est un loup pour l’homme » ! La clé du succès, et de l’évolution, réside dans la compétition !

Le dogme dominant affirme que toutes nos actions, normes, institutions et croyances s’expliquent par le jeu des intérêts en conflit.

 

 

Et pourtant, partout de la collaboration 

Même si les mécanismes de collaboration, de relations mutuellement bénéfiques, avaient été mises en évidence par Pierre Kropotkine dans son célèbre ouvrage « L’entraide » dès 1902, ce n’est que depuis les années 1970 que foisonnent les études qui mettent en évidence, pour les plantes, les animaux et les humains la puissance de ces forces au sein de l’évolution. Fourmis, sternes arctiques, pins à écorce blanche et sapin des Rocheuses : de l’entraide entre semblables, lointains cousins mais aussi « entre organismes qui n’ont rien à voir » ! « Des mutualismes (associations diffuses entre espèces) aux symbioses (associations obligatoires), de l’action collective ponctuelle à la coévolution fusionnelle, les services se donnent et se rendent dans tous les sens … ». Le vivant est une « inextricable pelote d’interdépendance ».

Et les humains n’échappent pas à cette règle : partout de la coopération, de l’aide, du rejet des injustices et ceci principalement en situation de crise.

 

Environnement

Les conditions environnementales jouent un rôle prépondérant dans l’évolution de l’entraide.

Darwin avait effectué ses observations sous les tropiques (milieu d’abondance nutritive et de confort thermique) et Kropotkine en Sibérie (moins de nutriments et conditions bien plus rudes). Milieux pauvres en ressources ou milieux riches privilégient soit l’entraide, soit la compétition.

 

Comment nous expliquer ces comportements ?

L’épigénétique a montré que l’activation ou la mise en veille de certains de nos gènes est héritable ! Et nos gènes réagissent à l’environnement, nous héritons donc des réactions de nos ancêtres à leur environnement, « la culture s’imprime dans notre biologie, de génération en génération. » Les hommes n’ont pu s’adapter qu’avec et grâce aux autres, la collaboration nous est indispensable. L’obligation de réciprocité est au cœur de l’humanité, la « triple obligation de « donner-recevoir-rendre » génère un état de dépendance réciproque ».

Nous sommes « équipés » pour la collaboration. Nos cerveaux possèdent ce que l’on appelle des « neurones miroirs » qui nous permettent de percevoir, de sentir, d’entrer en résonance avec les émotions d’autrui. Et ce « lien qui nous attache aux sentiments des autres et qui nous rend interdépendants s’appelle l’empathie. »

 

Et au sein de nos sociétés s’installe (plus ou moins !) un double mécanisme « qui récompense les comportements prosociaux (la carotte) et punit les comportements antisociaux. C’est la réciprocité renforcée. Différents mécanismes feront donc apparaître et renforceront l’entraide dans nos groupes et sociétés. L’éducation et les normes sociales peuvent, ou non, renforcer notre aptitude à collaborer. Une nouvelle conception de la nature humaine irrationnelle et prosociale se dessine !

 

Une mythologie hémiplégique

L’ouvrage nous propose donc une vision d’un monde composé tant de compétition que de coopération. Et ces deux mouvements forment nos relations au sein des collectifs et entre les collectifs. Les capacités d’entraide sont spontanées, mais pour les maintenir, il nous faut vivre dans un contexte qui les privilégient. L’entraide trouve son origine dans un acte de don, sa logique est celle de « donner-recevoir-rendre » au cœur de tout lien social. Le maintien d’une réciprocité généralisée à l’ensemble du groupe se fait « grâce à des mécanismes qui l’étendent et la renforcent : le mécanisme de réputation, la récompense des comportements vertueux et la punition des comportements antisociaux. »

 

Pour conclure cette petite présentation, laissons Pablo s’exprimer : 

« En baignant dans le mythe d’une nature agressive et compétitive, nous nous sommes battus sur le terrain imaginaire adverse. Or, nous savons désormais que compétition et coopération sont des forces antagonistes très puissantes qui coexistent à tous les niveaux du vivant. En observant le monde vivant sans œillères, nous pouvons commencer à faire le deuil du mythe d’un état de nature en guerre permanente de tous contre tous, d’un combat de gladiateurs quotidien où on ne se fait pas de quartier. Voici donc la première étape pour décloisonner notre imaginaire, pour le décomplexer et lui redonner confiance dans sa capacité à faire germer la coopération. Nous pouvons enfin, grâce aux découvertes de la science des dernières décennies, nous inspirer à nouveau du monde vivant pour innover. Ainsi, l’agroécologie, la permaculture et plus largement le biomimétisme ont pris racine dans cet incroyable réservoir de soutenabilité et de coopération qu’est la vie. Elles se sont ainsi rendu compte qu’en appliquant les principes du vivant – et en particulier la coopération– au fonctionnement de nos organisations, ces dernières se portaient beaucoup mieux, prenant ainsi soin des personnes qui y travaillent. » PABLO SERVIGNE

 

 

 

 

 

Réflexion et résumé

octobre 2024 :

septembre 2024 | novembre 2024

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